[-] [email protected] 1 points 1 hour ago

J'ai bidouillé FreeOTP+ et j'ai perdu le MDP, d'où le alt

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submitted 2 hours ago by [email protected] to c/[email protected]
[-] [email protected] 2 points 9 hours ago

Écrire un cacapostage est une méthode cacarthique pour sublimer le désagrément en un acte créateur.

[-] [email protected] 5 points 9 hours ago* (last edited 9 hours ago)

Le Collectif Stop Croisières : https://stop-croisieres.org/

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submitted 9 hours ago by [email protected] to c/[email protected]
[-] [email protected] 1 points 10 hours ago

T'es sacrément organisé !

[-] [email protected] 4 points 10 hours ago* (last edited 10 hours ago)

Bonjour all !

Tranche de vie naze TW caca : un mec a roulé dans la merde et laisse son vélo dormir dans le garage à vélo. Ça fait donc une semaine que tous les jours en allant au taff je respire une odeur de caca à 8h du mat en récupérant mon vélo. Je réfléchis à un moyen civilisé de mettre fin à cette situation parmi lesquels :

  • mettre une affiche, ça fait voisin relou
  • brûler son vélo, mais c'est dangereux et pas gentil
  • nettoyer sa roue, c'est un peu soumis quand même

Finalement, je pense patienter et attendre que l'odeur se dissipe (appelons ça la procacastination). Aussi ça m'amène à me poser la question suivante : combien de temps une odeur de merde peut-elle demeurer ? Je pense que c'est aussi une question de revêtement sur laquelle elle se retrouve et la composition de la merde en question. Par exemple je me souviens d'une personne qui avait vomi dans le couloir de l'appart où il y avait de la moquette au sol, bien que nettoyer dans les 3 jours, l'odeur était restée durant des mois. Donc si vous avez une étude scientifique américaine à ce sujet je suis preneur, ça me permettra de réfléchir au feu ou pas.

[-] [email protected] 4 points 1 day ago

Y'a du gros morceau d'autobio, mais tout va bien t'inquiète, ça a toujours été comme ça.

[-] [email protected] 6 points 1 day ago* (last edited 1 day ago)

Cet article est un peu daté, ça fait depuis Juppé que le foncier bordelais est devenu uniquement accessibles aux riches. La responsabilité en incombe autant aux pouvoirs publics qu'aux propriétaires qui sont contents de vendre leurs échoppes pourries achetées 80 000 € sous Chaban Delmas à 600 000€ aujourd'hui.

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submitted 1 day ago* (last edited 1 day ago) by [email protected] to c/[email protected]

L’un est un éminent professeur au Collège de France, où il dirige la chaire «Questions morales et enjeux politiques dans les sociétés contemporaines». L’autre est un incontournable enseignant en sciences politiques qui vit en Israël depuis cinquante ans et se définit comme un citoyen franco-israélien de gauche. Dans Une étrange défaite (la Découverte), Didier Fassin, dont les travaux portent sur la question de «l’inégalité des vies», revient sur le soutien «passif et actif» des pays occidentaux à la destruction de Gaza et au massacre de sa population.

Sa vision de l’intensification du conflit au Proche-Orient depuis le 7 Octobre diverge parfois profondément de celle de son confrère Denis Charbit qui publie Israël : l’impossible Etat normal (Calmann-Lévy). Pour ce dernier, professeur de sciences politiques à The Open University of Israël, cette guerre, qui a commencé bien avant l’attaque sanglante du Hamas en Israël il y a un an, a annihilé toute notion d’universel chez les Israéliens comme chez les Palestiniens. Guerre des récits, qualification de génocide, antisémitisme… Entre les deux chercheurs, les points d’entente sont rares, mais la volonté de dialogue bien présente.

Quelles leçons tirez-vous de l’année qui vient de s’écouler ?

Denis Charbit : Ce fut l’année terrible. Israéliens et Palestiniens sont sous la coupe des leaders les plus funestes qu’ils ont connus depuis un siècle. On parle du «jour d’après», mais si Nétanyahou est réélu aux prochaines élections, il n’y en aura pas. Pas plus de «jour d’après», au demeurant, si le Hamas se maintient, si exsangue soit-il. Le 7 Octobre a fait ressurgir la question palestinienne en Israël non à travers l’opération elle-même, le nombre de morts pourtant sans précédent, ou encore la prise d’otages, mais à travers les modalités du massacre, la jouissance de donner la mort et de la filmer. La manière dont le Hamas a opéré vise à rendre impossible toute perspective de réconciliation. Afin qu’il n’y ait plus un seul Palestinien qui trouve légitime la présence des Israéliens sur cette terre et pour qu’en Israël, plus aucun Juif ne puisse pardonner et chercher la paix.

Un abri, dans le kibboutz Mefalsim, où des personnes ont été tuées alors qu’elles y cherchaient refuge le 7 Octobre. (Amir Cohen/REUTERS)

Même si la situation était invivable en Palestine, on ne saurait conférer à ce qui s’est passé la dignité d’une «révolte». C’est nier et noyer l’horreur de l’événement. Le Fatah, qui a commis maints attentats, n’aurait jamais entrepris un pareil massacre. Quand António Guterres dit : «It did not happen in a vacuum» [«cela ne s’est pas produit en dehors de tout contexte», ndlr], tout le monde a pensé à la «Nakba» et à l’occupation, faisant passer à la trappe le ressort majeur de cette attaque : l’islamisme.

Didier Fassin : Il y a une triple temporalité de cette année écoulée. La première correspond à une date, le 7 Octobre, qui a profondément traumatisé les Israéliens et une grande partie des Juifs de la diaspora, car c’est l’attaque la plus meurtrière subie par le pays depuis sa naissance et elle a ébranlé la confiance que les habitants avaient dans l’invincibilité de leur armée. La seconde se réfère aux mois qui ont suivi, avec la destruction de Gaza. Elle procède d’une intention proclamée par le gouvernement israélien et ses plus hautes instances militaires de punir non pas simplement le Hamas, mais aussi la nation palestinienne, en éliminant le territoire de la face de la Terre, dans les mots du vice-président de la Knesset. La troisième se rapporte à ce qui s’est passé avant, qu’on remonte à la déclaration Balfour de 1917, à la création d’Israël sous l’égide des Nations unies en 1948, ou encore, ce qui est plus souvent retenu, à la fin de la guerre des Six Jours en 1967.

Dans le quartier d’Al Rimal, dans l’ouest de la ville de Gaza, le 10 octobre 2023. (Loay Ayyoub/Getty Images)

Mon travail a été de relier cette triple temporalité et de voir comment elle a été traitée, parfois malmenée, souvent effacée voire censurée. S’agissant du 7 Octobre, une version la qualifie de pogrom, autrement dit un assassinat de Juifs en tant que tels. C’est celle qui s’est imposée dans la plupart des pays occidentaux, le président français parlant du «plus grand massacre antisémite de notre siècle». L’autre la désigne comme une résistance, la considérant comme une réponse tragique à des décennies d’occupation. Une analyse dénoncée dans ces pays comme apologie du terrorisme. Le choix de l’une ou l’autre de ces versions a des conséquences importantes. S’il s’agit d’un pogrom, c’est un crime contre l’humanité qui évite tout contexte historique et nie toute responsabilité israélienne. S’il s’agit d’un acte de résistance, aussi terrible soit le meurtre de civils, il y a ce que les anthropologues appellent une «situation», qu’il importe de comprendre en vue d’une solution pacifique.

Aujourd’hui, peut-on encore être à la fois pro-israélien et pro-palestinien ?

D.C. : Je peux reprendre à mon compte une partie du propos de Didier Fassin, mais cette lecture reste foncièrement hémiplégique. On peut et on doit accabler Israël, et je le fais, mais il faut se tenir sur une ligne de crête et entendre ce qu’il y a d’audible dans chacune des deux parties. Vous prétendez examiner les thèses de part et d’autre : il n’y a pas une seule thèse côté israélien que vous reprenez à votre compte. Car ce qui préside dans le débat d’idées autour de ce conflit, c’est la logique du prétoire. Notre fonction comme intellectuel n’est pas d’être l’avocat de la défense pour sauver son client devant le tribunal de l’histoire en prenant bien soin de cacher ses fautes.

Je ne suis pas là pour défendre une cause, mais poser à chacune des parties la limite à ne pas franchir. Israël a le droit d’exister, pas celui de coloniser. Les Palestiniens ont le droit à l’autodétermination, pas celui de liquider Israël en paroles et en actes. S’il y a bien une année où il aurait dû être particulièrement compliqué de se déclarer pro-palestinien ou pro-israélien, c’est bien cette année. Concernant le massacre, quelle est la part du libre arbitre et la part du contexte ? Je plaide par principe : 50-50. Sartre explique dans L’existentialisme est un humanisme que même en prison, un détenu peut décider de coopérer avec son geôlier ou de déclencher une mutinerie.

Comme j’accorde plus de poids à la conscience individuelle, la formule devrait être : 49 % de nos actes relèvent du contexte, 51 % à notre responsabilité propre. On n’exonère donc pas le Hamas à cause du contexte, pas plus qu’Israël. Je suis d’accord avec vous quand vous notez que les gouvernements européens ont soutenu Israël pendant la guerre. Mais on ne peut le dire des médias ou des intellectuels. Pour expliquer ce soutien, vous émettez l’hypothèse de la culpabilité des pays occidentaux qui tiennent à se racheter après l’Holocauste. C’est vrai pour l’Allemagne, pas pour les autres Etats. Puis vous avancez une seconde explication : le racisme antimusulman des élites européennes. Or, il me semble que la raison du soutien à Israël tient à la fois à la menace iranienne et au massacre du 7 Octobre.

D.F. : Rappeler l’histoire n’est pas mettre en cause l’existence de l’Etat d’Israël. Evoquer que cette existence est un fait colonial, c’est simplement se souvenir que le colonisateur britannique en est à l’origine, et que la colonisation se poursuit depuis plusieurs décennies. Mais les Etats-Unis ou l’Australie ont aussi une histoire coloniale. Ensuite, expliquer n’est pas justifier. Cette confusion a souvent été utilisée pour délégitimer le travail des sciences sociales. Dans l’Etrange Défaite, quand Marc Bloch explique les raisons de la débâcle française face à l’armée allemande, il ne justifie rien.

Venons-en aux explications du consentement des pays occidentaux à l’écrasement de Gaza. L’invocation de la dette des pays occidentaux à l’égard d’Israël doit être relativisée, car même les Allemands admettaient après la Seconde Guerre mondiale aider Israël pour établir un bastion occidental dans un monde arabe hostile. Cet enjeu géopolitique est essentiel, sans cesse rappelé par Nétanyahou. Les dimensions économique, avec la création d’un grand marché au Moyen-Orient, et militaire, avec la livraison d’armements, sont également importantes. Mais on ne peut nier l’exacerbation récente d’un racisme antiarabe et antimusulman documenté par de nombreuses enquêtes internationales. Or, les Palestiniens sont arabes, majoritairement musulmans et, de surcroît, insidieusement associés au terrorisme.

Selon vous, est-il pertinent de parler d’un génocide des Palestiniens à Gaza ?

D.F. : Concernant la qualification de génocide, des arguments solides ont été apportés par l’Afrique du Sud, jugés plausibles par la Cour internationale de justice. Il s’agit de l’intention, exprimée par les plus hauts dignitaires israéliens, de faire disparaître Gaza et ses habitants, et de sa concrétisation à travers les bombardements des populations civiles, l’asphyxie du territoire par un siège total, le blocus de l’aide internationale, les meurtres de travailleurs humanitaires. Mais l’officialisation de cette qualification n’interviendra éventuellement qu’au terme d’un long processus judiciaire dans lequel les rapports de force entre pays pourront s’avérer plus déterminants que le droit international. La possibilité d’un génocide commis par l’Etat hébreu créé après la Shoah est une question éminemment sensible.

D.C. : Il y a une réalité indéniable : le nombre de civils tués par les frappes aériennes d’Israël. Je ne crois nullement à l’intention génocidaire d’Israël au sens d’élimination systématique. Deux facteurs expliquent cette hécatombe : les mécanismes qui permettent à une population civile d’être épargnée n’ont pu jouer à Gaza : pas d’abri souterrain pour les protéger et pas de pays voisin pour s’y réfugier. La rage consécutive au 7 Octobre et la détermination à éradiquer le Hamas ont conduit le gouvernement et nombre d’Israéliens à s’affranchir des règles qui encadrent un conflit. Il n’y a pas eu de volonté préalable, mais on s’est accommodé d’un bilan meurtrier si élevé. Comme aurait dit le philosophe israélien Yeshayahou Leibowitz (1903-1994), disparu il y a trente ans : «Même si cela peut être justifié, cela reste maudit.» Trop de mes concitoyens penchent du côté de la justification. Je fais partie de ceux, minoritaires, qui jugent la riposte maudite.

La question de l’égalité des vies, sur laquelle vous avez beaucoup travaillé, Didier Fassin, est au cœur des tensions…

D.F. : Lors des deux précédentes guerres à Gaza, en 2009 et en 2014, il y a eu 250 fois plus de civils tués du côté palestinien que du côté israélien. Dans le conflit en cours, on parle de plus de 40 000 morts, nombre sous-estimé, car il ne prend en compte que les corps retrouvés. En proportion de la population, c’est l’équivalent de 1,3 million de morts en France. Mais l’inégalité des vies ne se résume pas à une comptabilité des morts. Elle tient à la qualité des existences vécues, d’un côté, par les Israéliens libres de se déplacer, d’étudier, de travailler, d’être des sujets de droit, et de l’autre, les Palestiniens sous la menace permanente de destruction de leurs champs, d’attaques de colons, de tirs de soldats, d’emprisonnements illimités sans chef d’accusation.

Depuis le 7 Octobre, le traitement médiatique de ces vies a été largement asymétrique. Des Israéliens, on a décrit le quotidien, les inquiétudes, les colères. On a moins parlé des exactions de leurs soldats et des tortures infligées à leurs prisonniers. Des Palestiniens, on n’a guère entendu la voix pour savoir les souffrances des mères dénutries incapables d’allaiter leurs nouveaux-nés et les traumatismes des enfants orphelins et blessés. Après la libération de quatre otages israéliens par l’armée le 8 juin dernier, les grands médias audiovisuels ont rendu compte de cette opération réussie et du soulagement des familles, mais se sont contentés de mentionner en fin de reportage les 274 morts et plus de 700 blessés parmi les civils palestiniens lors de l’intervention. Un autre récit présente cette opération comme le «massacre de Nuseirat».

D.C. : J’envie les Européens pour qui une vie en vaut une autre. Mais ne nous leurrons pas. La logique de guerre au Moyen-Orient anesthésie la notion d’universel et déshumanise. Je ne peux pas penser une seconde que pour un Palestinien, la vie d’un Israélien est égale à la sienne. Et vice versa. Les 1 200 morts israéliens m’ont arraché des larmes que je n’ai pas versées pour les civils parmi les 40 000 morts palestiniens. Je le déplore, bien entendu.

La proximité géographique, ethnique, religieuse, linguistique, familiale joue dans l’émotion que nous ressentons face à la mort de quelqu’un. Mais si l’on s’est plus apitoyé en Europe sur les victimes israéliennes que sur les victimes palestiniennes autrement plus nombreuses, ce n’est pas à cause de la nationalité, de la religion ou de la condition politique de la victime, mais à cause des conditions dans lesquelles la mort a été infligée.

C’est-à-dire ?

D.C. : Larguer une bombe qui fait des centaines de morts et massacrer un par un des festivaliers de Supernova ou des habitants des kibboutz n’est pas perçu de la même manière. Pourquoi ? Sans doute parce que nous sommes plus rebutés par la mort perpétrée consciemment que par la mort qui fauche aveuglément. Le sentiment qui domine en Israël et en diaspora, c’est que cela fait bien longtemps que les victimes palestiniennes ont recouvert par leur nombre les atrocités commises le 7 Octobre sur les Israéliens.

L’émotion en Israël est également conditionnée par l’histoire longue : non, tout ne commence pas pour les Israéliens le 7 Octobre. Cette date s’inscrit dans une autre temporalité : la longue série du refus arabe et palestinien d’Israël : le refus du plan de partage en 1947 ; puis l’échec, en 2000, du sommet de Camp David ; enfin, le retrait du Sud-Liban en 2000 et le désengagement de la bande de Gaza en 2005.

La leçon qu’en ont tirée la plupart de mes concitoyens, c’est que lorsque Israël se retire d’un territoire, il y perd en sécurité. Comment voulez-vous plaider, comme je le fais avec mon bâton de pèlerin, pour le retrait de la Cisjordanie ? Mais attention, je n’ai pas une lecture hémiplégique du conflit : il y a eu la Nakba en 1948 et il y a l’occupation depuis 1967. Trop de mes concitoyens refusent de comprendre que notre droit imprescriptible à l’existence nationale et étatique ne peut moralement se réaliser en persistant à dénier le droit à l’existence nationale et étatique des Palestiniens.

D.F. : Affirmer que la mort fauche aveuglément à Gaza, quand un ministre dit trouver moral d’affamer les deux millions d’habitants, quand on bombarde des écoles où l’on a demandé aux déplacés de trouver protection, quand on tire sur des personnes venues se ravitailler, quand on tue dans des camps de torture, c’est ajouter à l’injustice de l’inégalité des vies l’injustice de sa justification.

Dans ce contexte, prendre parti pour la souffrance des Palestiniens et se faire la critique de la politique du gouvernement israélien a pu être taxé d’antisémitisme…

D.F. : Le paradoxe est que la critique d’un gouvernement dominé par l’extrême droite, pratiquant le suprémacisme religieux, irrespectueux du droit international, accusé de génocide, ait pu être assimilée, en démocratie, à de l’antisémitisme. Cette accusation a été instrumentalisée après le 7 Octobre dans la plupart des pays occidentaux pour réduire au silence les protestations contre les massacres commis à Gaza et les demandes d’un cessez-le-feu.

Il faudrait revenir à la lettre de la définition de l’Alliance pour la mémoire de l’Holocauste reconnue en 2016 par 31 Etats, dont la France, l’Allemagne, les Etats-Unis et Israël, qui affirme que critiquer Israël comme on critiquerait tout autre Etat ne peut pas être considéré comme de l’antisémitisme. Sans compter l’explication de texte fournie par les 350 spécialistes des études juives du monde entier dans la Déclaration de Jérusalem en 2020, qui précise que s’opposer au sionisme en tant que forme de nationalisme, ou plaider pour le boycott, le désinvestissement et les sanctions, ne relève pas de l’antisémitisme. Une telle reconnaissance ferait reculer le véritable antisémitisme, lequel doit bien sûr être condamné.

Lors d’une manifestation contre l’antisémitisme organisée par le Crif, à Montpellier, le 27 août 2024. (Pascal Guyot/AFP)

D.C. : Oui, mais vous omettez de dire dans votre livre que l’antisémitisme en France tue. Vous évoquez l’antisémitisme pour dire qu’il est encore largement d’extrême droite, mais surtout pour gloser sur l’instrumentalisation de l’antisémitisme par Israël et par les institutions juives, etc. L’antisémitisme n’est pas qu’un discours, c’est un passage à l’acte, comme on l’a vu récemment avec l’attaque de la synagogue de la Grande-Motte. Quant à l’antisémitisme de militants de l’extrême gauche, vous n’en dites rien. Pourtant, il y a des discours qui ne trompent pas. Mais, en vérité, ce ne sont pas tant les préjugés antisémites qui me préoccupent que la violence antisémite, qui a très fortement augmenté depuis le 7 Octobre.

D.F. : Les enquêtes montrent qu’il y a en France un recul progressif du sentiment antisémite, mais avec une recrudescence lors des guerres contre les Palestiniens. L’antisémitisme est évidemment une réalité, comme le sont d’ailleurs l’islamophobie et le racisme anti-arabe, aujourd’hui plus prévalents dans notre société. Les Français sont quatre fois plus nombreux à dire qu’ils ne se sentiraient pas à l’aise si leur voisin était musulman que s’il était juif.

Rassemblement de soutien aux Palestiniens, place de la Nation à Paris, le 8 septembre 2024. (Fiora Garenzi/Hans Lucas)

Denis Charbit, à quel moment l’antisionisme recoupe-t-il l’antisémitisme ?

D.C. : «Antisémitisme» et «antisionisme» ne doivent pas être confondus. L’accusation d’antisémitisme doit être l’arme du dernier recours. Je suis terrifié de voir le ministre des Affaires étrangères israélien dénoncer Joseph Borrell comme un antisémite. C’est consternant. Mais quiconque se dit antisioniste doit se poser en permanence la question de son lien potentiel à l’antisémitisme. Toute remise en cause de l’existence de l’Etat d’Israël – pas de sa politique – peut converger avec l’antisémitisme, car il n’est pas un seul pays qui colonise, occupe et fait la guerre dont on réclame la disparition, excepté Israël. Cette exception mérite réflexion, tel le slogan «Free Palestine from the river to the sea», qui induit la disparition d’Israël et des Juifs en Israël.

D.F. : Il faut rappeler que ce slogan est présent en 1977 dans la Plateforme du Likoud, parti le plus souvent au pouvoir depuis un demi-siècle, soit onze ans avant sa formulation dans la charte du Hamas. «De la mer au Jourdain, il n’y aura de souveraineté qu’israélienne», proclame le texte. Le Premier ministre l’a rappelé à plusieurs reprises dans les mois qui ont précédé le 7 Octobre, y compris en montrant devant l’Assemblée générale des Nations unies une carte du Moyen-Orient sur laquelle Israël avait absorbé la Cisjordanie et Gaza. La colonisation de la première et la destruction de la seconde indiquent d’ailleurs que, loin d’être menacé dans son existence, l’Etat hébreu œuvre à la disparition de la Palestine.

Comment sortir de cette situation où la perspective d’une solution pacifique semble inconcevable ?

D.C. : Ce n’est pas en invoquant l’exemple de l’Afrique du Sud, comme Didier Fassin le fait dans son livre, que l’on va inciter les gouvernements occidentaux à réviser leurs positions et convaincre les Israéliens qu’ils ont tort de coloniser. C’est en leur disant qu’ils ont les moyens d’imposer à Israël le retrait des colonies et le retour aux frontières de 1967. A tout prendre, je préfère la partition exemplaire qu’ont réalisée Tchèques et Slovaques. Havel n’est pas moins valeureux que Mandela.

Nonobstant leur effroyable condition, ce n’est pas favoriser la réconciliation entre les deux peuples que de dire aux Palestiniens : vous souffrez, donc tout est permis. L’indépendance d’Israël n’est pas négociable, pas plus que celle de n’importe quel Etat de la planète, et c’est vrai aussi de la Palestine. C’est pourquoi notre devoir comme intellectuel n’est pas de délivrer des permis de tuer, mais de donner des «conseils de prudence», comme dit Camus.

D.F. : Des intellectuels délivrant des permis de tuer ont, en effet, été entendus en Israël après le 7 Octobre, et c’est regrettable. Mais le cas de l’Afrique du Sud, où j’ai mené des recherches pendant huit ans, mérite l’intérêt, car il montre les conditions de possibilité d’un chemin vers la paix. En 1994, après un siècle de ségrégation, puis d’apartheid, le pays était au bord de la guerre civile. Et pourtant, une transition démocratique et pacifique a eu lieu.

Trois éléments ont permis cette évolution heureuse : l’existence de mouvements de résistance dans le pays, soutenus par les syndicats et des églises ; la multiplication des pressions internationales, avec la campagne de boycott, désinvestissement et sanctions ; enfin la présence d’un leader visionnaire, Nelson Mandela, et d’un politicien pragmatique, Frederik De Klerk. Aucune de ces conditions n’existe malheureusement aujourd’hui en Palestine

[-] [email protected] 2 points 1 day ago

De mon côté je déplore le manque de capacité d'objectivation des uns et autres dans les rapports de classe. La désertion de la question syndicale en est l'exemple le plus flagrant.

Tu peux avoir des discours féministes, décoloniaux, écologiques etc, tant que tu te penses pas face à un pouvoir qui cumulent les différents instruments qui façonnent le monde, ben tu sers qu'à aménager l'acceptabilité de ce système fondé sur de la domination sociale.

Y'a pas de safe zone sous le capital. Et tout seul ou en micro-groupe on se fera toujours défoncer. C'est salement ironique quand on réalise qu'on oeuvre tous à un objectif qui n'est pas le nôtre.

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Oublier (sh.itjust.works)
submitted 2 days ago* (last edited 1 day ago) by [email protected] to c/[email protected]

J'oublie des choses, des gens. Un peu tout.

Lorsque mon première amour s'est terminé, j'ai cru que j'allais jamais m'en remettre, que ça allait être dur. Ça l'a été. Puis quelques mois plus tard je l'ai recroisée dans la rue. Et je ne l'ai pas reconnu, j'avais oublié son visage. Il m'est aussi arriver de ne pas reconnaître ma partenaire de vie du moment car sa tête était différente : elle s'était accrochée les cheveux par exemple.

Je n'ai pas non plus la mémoire des dates. Mes précédents téléphones servaient de repères temporels avec les photos, les SMS etc. Maintenant que j'efface tout, je me rends compte que je mélange les années, les déménagements. La crise de la COVID a achevé ce processus de destruction. Seul demeure l'ordre chronologique dans lequel j'ai habité les 8 villes de mon existence. J'ai encore en mémoire des endroits, la cartographies des centres villes, l'endroit où la bière était bonne et la terrasse ensoleillée.

J'oublie la mort de mes proches. Ce n'est pas comme si j'avais oublié qu'il était mort mais un peu, je ne sais plus quand. Seul un souvenir flou demeure. Il m'arrive d'oublier les vivants. J'attends alors le déclic qui les fasse revivre dans ma tête alors qu'ils sont en face en train de parler.

J'oublie ma gueule, j'oublie qu'elle peut faire peur, qu'elle peut faire pitié, j'oublie ma voix. Non en fait ma voix je ne l'a reconnais jamais. Vous vous êtes déjà entendu ? Sur un répondeur, sur une vidéo, c'est terrible.

J'oublie que j'oublie. Le pire. La blague c'est quand on me dit "Rappelle-moi que je dois.." On rigole tout le temps après cette phrase. "Je devais te rappeler un truc mais je sais plus quoi et plus quand".. C'était il y a 1 mois.

Et vous, votre rapport à l'oubli ?

[-] [email protected] 4 points 2 days ago

C'est limite énervant tant de prévisibilité.

[-] [email protected] 3 points 2 days ago* (last edited 2 days ago)

En lien avec ce poto : https://sh.itjust.works/post/24948388

A titre perso ce que j'en déduis c'est le manque d'ajustement du récit de la gauche face à celui développé par le RN (qui s'est justement développé à partir des carences de celui de la gauche), le procès de Ruffin à LFI acte ce divorce mais me paraît insuffisant.

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submitted 2 days ago* (last edited 2 days ago) by [email protected] to c/[email protected]

Chouette instru, chouette esthétique, chouette chant, chouette clip.

[-] [email protected] 6 points 2 days ago

Nouveau resto concept en vue

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submitted 3 days ago* (last edited 3 days ago) by [email protected] to c/[email protected]

En Allemagne, l’ancienne figure de Die Linke perce avec un discours dur sur l’immigration et les questions de société. En France, elle n’a guère d’équivalent. Même le positionnement de François Ruffin n’est pas du même ordre. Explications.

Dimanche 22 septembre, de nouvelles élections régionales se tiennent en Allemagne, dans le Land de Brandebourg. Elles devraient confirmer, trois semaines après les scrutins en Saxe et en Thuringe, la progression de l’extrême droite mais aussi la percée de l’alliance Sahra Wagenknecht (BSW), tout jeune parti fondé par l’ancienne dirigeante de Die Linke (gauche radicale).

Comme il y a six ans, lors du lancement de son mouvement Aufstehen, qui s’était déjà accompagné de propos polémiques sur l’immigration, le positionnement et le relatif succès de Sahra Wagenknecht interrogent en miroir la gauche française. La question peut se résumer brutalement : que ce soit souhaitable ou pas, y a-t-il un espace viable, dans notre pays, pour une force qui se présenterait de gauche sur les questions économiques et conservatrice sur les questions de société ?

En l’état actuel des choses, on peut constater qu’aucun équivalent français du parti de Wagenknecht n’a d’existence significative. Pour l’expliquer, il faut tenir compte de particularités allemandes difficilement transposables ; du fait que le Rassemblement national (RN) occupe déjà solidement le terrain d’un nativisme pseudo-social ; et de la part de choix des principales figures de la gauche française.

Un rappel trivial permet d’emblée de désépaissir le mystère : la France n’est pas l’Allemagne. Plus exactement, notre pays n’abrite pas la même variété de capitalisme, et n’a pas connu d’événement semblable à l’unification, après la chute du mur de Berlin, de l’Allemagne de l’Ouest (l’ex-RFA) et de l’Allemagne de l’Est (l’ex-RDA). Or, toute une partie du profil et de l’attractivité de Wagenknecht est colorée par ces particularités.

Sahra Wagenknecht, à Cottbus, Allemagne, le 22 septembre 2024. © Photo Frank Hammerschmidt / DPA via AFP C’est en effet dans les Länder orientaux que son parti enregistre ses meilleures performances. Aux européennes du mois de juin, la BSW y a recueilli des scores à deux chiffres, bien supérieurs à sa moyenne nationale. Le fait de résider en ex-RDA, montraient déjà des universitaires en 2023, était le facteur le plus prédictif de la probabilité de voter pour Wagenknecht. « Il semble que la synthèse propre au BSW […] soit particulièrement en phase avec la culture politique de l’Allemagne orientale », résume l’historien Thorsten Holzhauser dans une note pour le think tank l’Ifri (Institut français des relations internationales).

La population de l’est de l’Allemagne se distingue par des jugements nettement plus négatifs envers les minorités, et par un mécontentement davantage marqué à l’égard du système politique. Elle est aussi travaillée par un ressentiment spécifique contre la liquidation économique et culturelle dont le pays a fait l’objet au début des années 1990. En parallèle, certains héritiers du parti stalinien au pouvoir dans la RDA se sont largement convertis au nouveau monde capitaliste, tout en prétendant incarner l’identité et les intérêts des Allemands « orientaux ».

Dans ce contexte, Sahra Wagenknecht prospère sur un créneau politique qui n’a en réalité pas grand-chose de gauche. Elle défend indistinctement salariat et « bon » patronat, sans avoir de lien privilégié avec des organisations syndicales. Son programme est tourné vers la reconstitution d’une classe moyenne « normale », préservée à la fois des contraintes écologiques excessives, des « injonctions » venant des milieux féministes ou LGBT, et des coûts attribués à l’immigration. Fidèle au « doux commerce » si crucial pour le modèle allemand, la dirigeante de la BSW fait preuve d’une complaisance maximale envers le régime de Poutine.

Un mélenchonisme resté arrimé à la gauche L’originalité de ce cocktail peut difficilement être répliquée en France – et de fait, aucun acteur de premier plan ne s’y risque, du moins sous cette forme précise. Mais une seconde raison doit être mobilisée pour expliquer l’absence de tentative réussie d’une stratégie de « gauche conservatrice ». Elle tient aux choix qui ont été faits, en particulier à La France insoumise (LFI), depuis que le paysage électoral s’est recomposé au cours des années 2010.

Car de ce côté-ci du Rhin, il existe tout de même des personnes qui trouvent encore intéressante voire inspirante la voie tracée par Sahra Wagenknecht. Mais elles ont justement été les perdantes des arbitrages opérés entre-temps. C’est notamment le cas de Georges Kuzmanovic, ancien cadre de LFI et proche de Jean-Luc Mélenchon, qui dit regretter la « trahison historique » du leader insoumis. Celui-ci aurait dû, selon lui, épouser les rails idéologiques et stratégiques suivis par la dirigeante allemande.

Retour en arrière, à la fin de l’année 2008. Lorsque Mélenchon lance le Parti de gauche (PG), Oskar Lafontaine est dans la salle. Compagnon de Wagenknecht, il a fait dissidence de la social-démocratie de son pays trois ans auparavant, en raison des atteintes à l’État-providence dont elle s’est rendue coupable. À l’époque, le PG et Die Linke partagent la même ligne, consistant à réaffirmer l’existence d’une gauche de transformation face à la déliquescence de la voie sociale-libérale.

Une inflexion nette s’observe quand Mélenchon lance LFI en 2016. Il cherche à se décoller d’une identité de gauche trop étriquée, et assume volontiers une orientation populiste, dans laquelle pensent s’épanouir les tenants d’une sensibilité « républicaine et souverainiste ». Mais à partir de 2018, dans le contexte d’un macronisme virant à droite, le ton change de nouveau, en se faisant plus conciliant à l’égard du reste de la gauche. Malgré les tensions, le changement de pied est durable : LFI est motrice d’un rassemblement inédit des gauches aux législatives de 2022, réédité en 2024.

Tant que Mélenchon restera au centre du jeu, aucune stratégie alternative ne pourra s’imposer.

Pour le coup, cette orientation n’est pas compatible avec une voie similaire à celle de Wagenknecht. Fin 2018, Georges Kuzmanovic est débarqué de LFI après avoir qualifié de « salubrité publique » le discours de cette dernière sur l’immigration, et estimé qu’il fallait « réfléchir concrètement à la façon de ralentir, voire d’assécher les flux migratoires ». Désavoué à propos de cette interview, il est aussi accusé par le comité électoral insoumis d’avoir « publiquement réitéré des propos considérant comme secondaires les luttes féministes et LGBT ». Lui-même s’estime alors la victime de « gauchistes indigénistes ».

Autre porte-parole à être écarté à la même époque, François Cocq continue de trouver des mérites à Wagenknecht, estimant que les attaques à son endroit traduisent un effroi des « possédants ». Il estime qu’en s’étant fixé pour but la prise du leadership à gauche, Mélenchon a abandonné toute « perspective majoritaire » : « Il a adopté une “stratégie du socle”, pensant possible l’accès au pouvoir avec moins d’un tiers des voix, en posant comme un quasi-acte de foi qu’il gagnerait le second tour, pour peu qu’il y accède. »

De fait, dans sa dernière note de blog stratégique, le coordinateur national de LFI, Manuel Bompard, écrit que « la victoire du bloc populaire ne nécessite pas de réunir plus de 50 % des suffrages au premier tour », et ajoute qu’« il n’est pas vrai de dire qu’une majorité de Français préfèrent l’extrême droite à la gauche au second tour ».

Selon François Cocq, Ruffin aurait compris que « les ruptures à l’amiable avec Mélenchon sont impossibles ». Pour exister après avoir constaté un désaccord stratégique, il n’y aurait pas d’autre solution que de taper fort, et assez tôt par rapport à l’élection présidentielle à venir. « Par défaut, poursuit-il, l’assise populaire de Mélenchon et son talent personnel lui permettent de s’imposer face aux autres formations. Tant qu’il restera au centre du jeu, la situation politique à gauche sera cryogénisée. Aucune stratégie alternative ne pourra s’imposer. »

Des gains électoraux très incertains Le plus frappant reste que, même contestataire de la stratégie de LFI, François Ruffin est loin de cocher les cases de la « ligne Wagenknecht ». Il est certes accusé d’un défaut répété de prise en compte des dominations extérieures au monde au travail, et d’avoir versé dans l’opposition factice entre « social » et « sociétal ». Mais rien qui n’équivaille à la violence des termes et des propositions de Wagenknecht en matière migratoire, ni à son édulcoration de la dangerosité de l’extrême droite, ni à son dédain pour l’urgence écologique.

« Je ne serais pas engagé à ses côtés si j’avais des doutes là-dessus, confie Baptiste de Fresse de Monval, maire écologiste d’une petite commune de l’Oise. L’an dernier, il a dénoncé la loi immigration et défendu un service public de l’intégration. Son prisme n’a jamais été celui de l’origine, mais celui des petits contre les gros. Au clivage artificiel entre ceux qui sont français et ceux qui ne le sont pas ou ne le seraient pas vraiment, il veut substituer le clivage authentique entre ceux qui se gavent et ceux qui n’ont rien. »

Là où Wagenknecht adopte des postures très droitières sur le fond de certains enjeux, Ruffin fait plutôt entendre une différence sur la visibilité de ces enjeux (leur « saillance » dans le débat public, comme disent les politistes). « Nous savons que le racisme est un outil de la bourgeoisie, une barrière dressée pour diviser, écrit-il pour rassurer dans un billet de blog revenant sur ses reproches à LFI. Et qu’il nous faut le combattre, pour aider – comme dirait le vieux Karl [Marx] – à “l’unité de classe”. »

Ruffin a eu des propos hasardeux mais je ne le mets pas dans le même sac que l’extrême droite ou le Printemps républicain.

Benjamin Lucas, député Génération·s Même des responsables de gauche peu emballés par les dernières sorties de Ruffin n’y voient pas pour autant un décalque de la tentative de Wagenknecht. « J’ai rompu avec le Parti socialiste au moment de la déchéance de la nationalité, rappelle le député de Génération·s Benjamin Lucas. Je suis donc sensible à ces questions. Mais si je pense que Ruffin a eu des propos hasardeux et que les combats contre les injustices ne sont pas à hiérarchiser, je ne le mets pas dans le même sac que l’extrême droite ou le Printemps républicain. Il appartient toujours à la famille des gauches, qui peut parfois le rappeler à l’ordre et l’amener à rectifier le tir. »

Outre les colonnes vertébrales idéologiques des uns et des autres, il existe, d’un point de vue plus cynique, des raisons stratégiques qui rendent douteuse la pertinence d’une orientation « sociale-conservatrice ». Celle-ci a certes pu fonctionner au pouvoir dans des pays d’Europe centrale et orientale, dans lesquels l’individualisation des valeurs est peu prononcée. Mais rien ne dit qu’il puisse s’agir d’une formule gagnante en Europe de l’Ouest.

De nombreux travaux académiques l’ont documenté : un positionnement « chauviniste social » de la part de la gauche risque de générer peu de gains électoraux, voire de se traduire par des pertes auprès des votants déjà acquis. Le cas du Danemark, sans cesse mis en avant, n’est pas probant. Dans ce pays, la social-démocratie a effectivement durci son agenda sur la question migratoire tout en se réappropriant la défense de l’État social. Mais elle a stagné électoralement, sans guère mordre sur les soutiens de l’extrême droite, et a suscité les mécontentements de sa base.

En France, en tout cas, l’électorat de la gauche depuis 2017 est relativement homogène sur le plan de ses attitudes : il partage des préférences socioéconomiques et culturelles qui vont dans un même sens progressiste. S’écarter nettement de ces préférences, ce serait risquer de perdre des soutiens existants au nom d’un élargissement incertain. L’électorat du RN apparaît en effet très solide, précisément sur la base d’une offre identitaire, autoritaire et plus ou moins mâtinée de mesures « sociales ».

La question de la stratégie de la gauche, pour dépasser son statut de « tiers exclu » du pouvoir depuis 2017, reste ouverte. Parce qu’elle s’écarte grandement des principes de la gauche et que sa traduction en France rencontrerait de nombreux obstacles, la voie explorée par Sahra Wagenknecht en Allemagne ne semble pas être une réponse près d’être adoptée.

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A tous les hommes pour qui le procès Pelicot est un point de bascule, l’essayiste Morgan N. Lucas propose une feuille de route pour en finir avec les boys clubs. Plus de 200 personnalités masculines s’engagent dont Gaël Faye, Guillaume Meurice, Waly Dia, Gilles Lellouche…

Beaucoup disent que le procès des 51 violeurs est en réalité le procès de la masculinité. Beaucoup s’en offusquent, trouvant de bon ton de s’indigner parce qu’ils sont mis dans le même panier plutôt que de s’insurger face aux atrocités orchestrées par Dominique Pelicot et adoubées par tant d’autres hommes. Aujourd’hui pourtant, la question se pose : sept ans après le début de #MeToo, où en sommes-nous ? Qu’avons-nous appris ? Comment nous sommes-nous positionnés ? Où sommes-nous lorsque nos potes, nos collègues, nos frères ont des comportements ou des propos sexistes ? Où sommes-nous lorsque les femmes sont agressées ? Sans doute occupés à questionner la crédibilité de la victime, tout en affirmant que «pas tous les hommes», encore moins nous.

Pourtant, l’affaire Pelicot nous l’a prouvé, la violence masculine n’est pas une affaire de monstres, c’est une affaire d’hommes, de monsieur Tout-le-Monde.

Dire «tous les hommes», c’est parler de violences systémiques perpétrées par tous les hommes, parce que tous les hommes, sans exception, bénéficient d’un système qui domine les femmes. Et puisque nous sommes tous le problème, nous pouvons tous faire partie de la solution.

Mais alors par quoi commence-t-on lorsqu’on se rend compte que le patriarcat s’essouffle, que le vieux monde se meurt ?

Avant toute chose, on arrête de se croire indispensables. On comprend que les femmes n’ont pas besoin de nous et encore moins en ce qui concerne la libération féministe. Elles ont surtout besoin qu’on cesse de leur mettre des bâtons dans les roues. Comprenez que nos gros ego les empêchent d’avancer, que les «not all men» ne servent qu’à vous rassurer vous, pas elles. Il ne suffit pas de dire «moi je ne suis pas comme tous les hommes», ici les mots n’ont aucune valeur face à l’ampleur des violences. Aucune tant qu’ils ne sont pas suivis d’actions concrètes et quotidiennes.

Alors à ceux pour qui le procès Pelicot est le point de bascule. A ceux qui refusent de continuer à participer à un système qui, pour exister, a besoin de dominer la moitié de la population. Il est un peu tard mais il est encore temps. Toutefois, ne pensez pas que la mission consiste à jouer les héros, ne les libérez pas, cela fait des siècles qu’elles s’en chargent.

Il y a quelques mois, dans une interview, un acteur disait être prêt à mettre la main à la pâte mais demandait une feuille de route.

La voici, donnée par un homme aux autres hommes parce qu’il va falloir arrêter de demander aux femmes de nous mâcher le travail.

Arrêtons de considérer que le corps des femmes est un corps à disposition. Assurons-nous toujours du consentement de nos partenaires, cessons de le considérer comme une entrave mais plutôt comme le fondement nécessaire à toutes nos relations.
Prenons en charge nos émotions, arrêtons de nous regarder le nombril, d’inverser la charge victimaire, acceptons de nous remettre en question.
Désapprenons ce que l’on nous a enseigné, raconté de la masculinité, arrêtons de penser qu’il existe une nature masculine qui justifierait nos comportements. Il n’y a pas de nature dominante mais bien une volonté de dominer.
Examinons nos très nombreux privilèges pour les mettre au service du bien commun puis, à long terme, acceptons de les perdre complètement. Pour rappel, l’objectif final étant d’en finir avec cette organisation genrée qui induit «une division hiérarchique de l’humanité en deux moitiés inégales».
Eduquons-nous tout seul en continu et en profondeur, et arrêtons de penser que parce qu’on a lu un livre féministe, nous pouvons désormais mansplainer aux femmes les tenants et les aboutissants de leur lutte.
Apprenons à prendre au sérieux la parole féministe et pas uniquement lorsqu’elle sort de la bouche d’un homme. Nous ne faisons que répéter ce que les féministes disent depuis des siècles. Il serait alors de bon ton de commencer à croire directement celles qui sont à l’origine de ces théories sans attendre que la gueule du messager, parce qu’elle nous ressemble, nous revienne davantage.
Cessons de perpétuer les boys club, de protéger nos homologues masculins. Soyons solidaires avec les victimes, pas les agresseurs.
Comprenons que si aucune femme dans notre entourage ne se confie à nous sur les violences qu’elle a subies, cela ne sous-entend pas que ça n’existe pas. Par exemple, ce n’est pas parce que vous n’avez pas d’obus dans votre salon, que la guerre n’a pas lieu. La violence masculine est une réalité systémique. Il y a urgence à nous décentrer de nos propres expériences pour se forger une vision du monde plus ajustée. Il y a aussi urgence à nous montrer suffisamment dignes de confiance pour qu’elles puissent enfin nous raconter leurs réalités sans craindre nos réactions.
Ecoutons vraiment les femmes lorsqu’elles nous font part de leurs besoins et de leurs limites. Il est probable que si nous cessions deux secondes d’être en posture défensive, nous serions sans doute surpris par ce que l’on peut apprendre quand nous ne sommes pas occupés à nous justifier. N’acceptons pas uniquement de les écouter lorsque leur ton est plaisant. Elles sont tristes et en colère à raison, laissons-les nous l’exprimer.
N’attendons pas qu’une femme nous dise quoi faire pour nous mettre au travail. On a deux yeux pour voir et analyser notre environnement, on peut donc savoir ce qu’il est nécessaire de faire. Parce que c’est aussi une charge mentale de devoir nous dire les choses.

Et enfin : faisons tout ceci en silence, sans le crier sur tous les toits, sans attendre des applaudissements ou des félicitations.

On ne le dira jamais assez : «allié» n’est pas un statut qu’on s’auto-attribue, c’est un nom et un verbe. Il ne s’agit pas seulement de se dire mais d’agir et ce 365 jours par an. C’est un rôle qui devrait nous coûter, a minima, un peu de notre confort personnel. Et si tu souhaites te mobiliser tout de suite aux côtés des femmes dans la lutte contre les violences sexuelles, tu peux participer à la campagne #NotAllMen de la Fondation des femmes.

Alors voilà, tu l’as ta feuille de route. Tu ne pourras plus, aucun de nous ne pourra désormais dire qu’il ne sait pas quoi faire.

P.S : il est fort probable que d’autres hommes vous reprochent de mettre à mal votre virilité. Si tel est le cas, c’est un signe que vous êtes sur la bonne voie. Continuez.

Dernier ouvrage paru : Ceci n’est pas un livre sur le genre aux éditions Hachette Pratique.

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klaqaus

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